1.11.20

Islam, crise et incompréhensions


 (Scroll down for English and Arabic) 

 Voici mes quelques pensées sur les événements qui agitent la France et le monde musulman. Je les formule comme une lettre aux musulmans qui ont pris en grippe le président Français et ce droit au blasphème qu’il refuse d’abandonner et je veux essayer de clarifier quelques points dans un espoir de calmer les esprits:

Première clarification : Quand Emmanuel Macron a dit que l’Islam est en crise, je suis certain que ce n’était ni une attaque ni une critique de votre religion. Certes, il aurait pu être plus précis en disant par exemple,« le monde musulman traverse une crise » afin d’éviter tout malentendu. Mais  ce constat maladroitement exprimé est toutefois factuel. En effet, il faut malheureusement l’avouer, le monde musulman ne va pas bien en ce siècle : par exemple, la grande majorité des guerres civiles dans les  vingt dernières années  se sont déroulées dans des pays à majorité musulmane. Une analyse du Washington Post montre que 90% des victimes de guerres civiles sont musulmans. Ce n’était pas du tout le cas au vingtième siècle. Il n’y a jamais eu autant de tensions à l’intérieur même du monde islamique et notamment entre musulmans sunnites et chiites. Derrière ces dissensions se trouve un manque de leadership stupéfiant. Presque aucun dirigeant de grand pays musulman n’a vraiment l’appui légitime de sa population en ces temps. Enfin, le peuple Palestinien est abandonné de tous et notamment de ses anciens soi-disant amis. Résultat des guerres et de mauvaise gouvernance, la civilisation arabo-Islamique enregistre les plus faibles taux d’alphabétisation , les pires scores en droits de l’homme et de la femme, les plus faibles avancées économiques. A ces difficultés sans précédent depuis des siècles, s’est greffée l’hydre abjecte de l’intégrisme religieux, un fanatisme régressif, meurtrier et autodestructeur. Si ce n’était pas une crise, que serait-ce ?  Bien sûr, ce malheur ne vient pas de la foi musulmane elle même mais force est de constater que votre religion a été  instrumentalisée de nombreuses fois dans ces difficultés. Un dictateur a sapé la démocratie Turque sous couvert de religion, la Syrie a été détruite par ses divisions religieuses et la rivalité meurtrière entre l’Arabie et l’Iran est greffée sur la dissension religieuse. L’alphabétisation n’avance pas car on utilise la religion pour empêcher les femmes de s’instruire. On peine à moderniser la langue arabe et rapprocher sa forme écrite des formes orales sous des prétextes de religion. L’Islam a été dénaturé, utilisé sans scrupule par des dirigeants indignes pour asservir leurs populations, accaparer le pouvoir ou créer des guerres à des fins hégémoniques. Les autres civilisations en ont naturellement profité pour avancer leurs propres pions géopolitiques.

Une deuxième clarification: ce n’est pas une insulte à une religion que d’avouer qu’elle traverse une crise,  Et justement, la France est un pays qui a beaucoup souffert des crises religieuses avec l’Inquisition et les guerres de religion. C’est le pays de la Saint Barthélemy où des milliers d’innocents furent massacrés par surprise uniquement pour leur foi protestante. Mourir pour avoir blasphémé a été monnaie courante en France pendant des siècles et posséder un écrit jugé blasphématoire vous menait au bûcher. C’est sans doute pour ces raisons que l’attachement français à la stricte séparation de la religion et de la loi y est viscéral, utopiste, un peu extrême et parfois contre-productif (comme quand on y interdit les signes religieux à l’école).  Mais y interdire des caricatures serait un retour en arrière insupportable pour ce pays, un abandon de sa liberté religieuse durement gagnée au fil des siècles.  Je n’ai, comme beaucoup de Français, jamais aimé l’humour méchant de Charlie hebdo contre les religions et j’entends ceux qui critiquent l’outrance, je comprends aussi la tristesse qu’elle peut provoquer. Néanmoins, cette crise montre aussi que le monde musulman a besoin de prendre un peu de recul et s’affranchir des manipulations, nuancer et faire la part des choses plutôt que leur accorder une importance qu’elles n’ont simplement pas. Charlie Hebdo, titre satiriste d’extrême gauche n’est devenu populaire que lorsque  ses dessinateurs ont été massacrés. Pas le contraire. 

Troisième clarification: quand M.Macron  s’inquiète que les banlieues françaises soient gangrenées par le séparatisme islamiste, comment pouvez vous le lui reprocher? Quand des femmes non voilées se font siffler ou insulter quotidiennement dans les banlieues, quand des centaines de jeunes Français sont partis mourir en Syrie pour rien, quand des imams  illuminés appellent les jeunes à la désobéissance civile ou au jihad, n’auriez vous pas dit la même chose si vous étiez à sa place ? Une fois de plus, ce n’est pas votre religion qui est remise cause, c’est son instrumentalisation à des fins obscures et violentes qui est pointée du doigt. Elle a déjà emporté des centaines de victimes  du Bataclan à Toulouse, de Conflans à Nice et aucune âme quelque soit ses croyances ne devrait l’accepter. 

Dernière clarification: Contrairement à ce que vos leaders vous font croire, M. Macron n’est pas un ennemi des musulmans bien au contraire. Depuis qu’il a été élu, il a déployé des efforts considérables pour combattre l’islamophobie et les préjugés contre la communauté musulmane. Alors que ses adversaires appelaient à des débats sur l’Islam et agitaient le spectre islamiste et terroriste à des fins électoralistes et politiciennes, il a au contraire toujours choisi le chemin de la conciliation et du dialogue, il est le seul président français qui a parlé des crimes coloniaux de la France en Algérie  dans un espoir de refermer cette plaie.

Alors que faire à part appeler tout le monde au dialogu et au respect des lois? Appeler à de meilleurs leaders qui prêchent la paix et qui ne vous mentent pas? Est ce aussi un crime de vous dire que les sociétés fonctionnent mieux quand la religion est bien séparée de l’Etat? Mon cœur me dit que faire un procès en islamophobie à la France républicaine et jalouse de sa laïcité en ces jours de deuil a quelque chose d’obscène. Quand on tue pour des dessins, qu’on décapite et qu’on égorge des innocents, le procès doit vraiment commencer ailleurs et peut être dans les consciences de chacun.


🇬🇧

Islam, crisis and misunderstandings

 Here are my few thoughts on the events shaking France and the Muslim world. I formulate them as a letter to those who are resentful to the French president and the right to blasphemy that he refuses to give up and I want to try to clarify a few points in the hope of calming the spirits.

First clarification: When Emmanuel Macron said that Islam is in crisis, I am sure it was neither an attack nor a criticism of your religion. Certainly, he should have been more precise saying, for example, "the Muslim world is going through a crisis" in order to avoid any misunderstanding. But this observation is nonetheless factual. Indeed, one must unfortunately admit that the Muslim world is not doing well in this century: for example, the vast majority of civil wars in the last twenty years have taken place in countries with a Muslim majority. A Washington Post analysis showed that 90% of civil war victims in the world are Muslims. This was not at all the case in the twentieth century. There has never been so much tension within the Islamic world and especially between Sunni and Shia. Behind the dissent lies a staggering lack of leadership. Almost no leader of a great Muslim country has the legitimate support of his people. Finally, the Palestinians are abandoned by all and in particular by their former so-called friends. Result of wars and bad governance, the Arab-Islamic civilization records the lowest literacy rates, the worst scores in human and women's rights, the lowest economic progress. To these difficulties, unprecedented for centuries, has been added the abject cancer of religious fundamentalism, a regressive, murderous and self-destructive fanaticism. If this was not a crisis, what would it be? ”Of course, this misfortune does not come from the Muslim faith itself, but it is clear that religion has been exploited many times in these difficulties. A dictator has undermined Turkish democracy under the guise of religion, Syria has been destroyed by its sectarian divisions, and the murderous rivalry between Saudi Arabia and Iran is grafted onto religious dissension. Literacy is not advancing because religion is used to prevent women from learning. We are struggling to modernize the Arabic language and bring its written form closer to oral forms under pretexts of religion. Islam has been distorted, used without scruple by unworthy rulers to enslave their populations, seize power or create wars for hegemonic ends. Within this dismay, other civilizations naturally took the opportunity to advance their own geopolitical pawns at your expense.

A second clarification: it is not an insult to a religion to admit that it is going through a crisis, And precisely, France is a country which has suffered greatly from religious crises with the Inquisition and the wars of religion. . It is the land of Saint Barthelemy massacre where thousands of innocent people were slaughtered by surprise solely for their Protestant faith. Dying for blasphemy has been commonplace in France for centuries, and just being found in possession of a document considered blasphemous would take you to the pyre. It is undoubtedly for these reasons that the French attachment to the separation of religion and law is visceral, utopian, a little extreme and sometimes counterproductive (as when religious symbols are forbidden at school. ). But to ban caricatures there would be an unbearable step backwards for this country, an abandonment of its religious freedom hard won over the centuries. I, like many French people never really liked the wicked humor of Charlie Hebdo and I hear those who criticize its obscenity, I also understand the sadness that this humor can cause. However, this crisis also shows that the Muslim world needs to take a step back and free itself from manipulation, qualify and sort things out rather than give them an importance that they simply do not have. Charlie Hebdo, a marginal far-left satirist title, only gained popularity when its cartoonists were slaughtered by extremists. Not the other way round.

Third clarification: When Mr Macron worries that the French suburbs are plagued by Islamist separatism, how can you blame him? When unveiled women are whistled or insulted daily in the suburbs, when hundreds of young French men and women have left to die in Syria for nothing, when imams call on young people to civil disobedience or jihad, wouldn't you have said the same if you were in his place? Once again, it is not your religion that is being called into question, it is its instrumentalisation for obscure and violent ends that is singled out. It has already taken hundreds of victims from the Bataclan to Toulouse, from Conflans to Nice and no good soul whatever its beliefs can accept it.

Final clarification: Contrary to what your leaders have you believe, Mr. Macron is not an enemy of Muslims, quite the opposite. Since he was elected, he has made considerable efforts to combat Islamophobia and prejudice against the Muslim community. While his opponents called for debates on Islam and waved the Islamist and terrorist threat for electoral and political ends, he has instead always chosen the path of conciliation and dialogue. He is also the only French president who has spoken about colonial crimes of France in Algeria in a hope of closing this wound.

So what can we do apart from calling everyone to dialogue and to respect the law? Call for better leaders who preach peace and who don't lie? Is it also a crime to tell you that societies function better when religion is well separated from the state? My heart tells me that there is something gruesome about challenging  Republican France for its  extreme attachment to secularism in these days of mourning. When people kill for drawings, behead innocents  or cut their throats, the challenge must start elsewhere and maybe in everyone's conscience.

عن الإسلام والأزمة  ‏مع فرنسا وسوء التفاهم

 إليكم بعض أفكاري حول الأحداث التي هزت فرنسا والعالم الإسلامي. أنا أصوغها كرسالة ‏للمسلمين الذين ‏ ‏غضبوا علي الرئيس الفرنسي وهذا الحق في الكفر الذي يرفض التنازل عنه وأريد أن أوضح بعض النقاط على أمل تهدئة الأرواح:

التوضيح الأول: عندما قال إيمانويل ماكرون إن الإسلام في أزمة ، فأنا متأكد من أنه لم يكن هجومًا ولا نقدًا لدينكم. بالتأكيد ، كان ينبغي  عليه أن يكون أكثر دقة ‏قائلاً ، "العالم الإسلامي يمر بأزمة" من أجل تجنب أي سوء فهم. لكن هذه الملاحظة التي تم التعبير عنها بشكل اخرق هي مع ذلك واقعية. في ‏الحقيقة. يجب ‏الاعتراف للأسف بأن العالم الإسلامي ‏حالته سيئة جدا في هذا القرن: على سبيل المثال ، وقعت الغالبية العظمى من الحروب الأهلية في العشرين عامًا الماضية في البلدان ذات الأغلبية المسلمة. يُظهر تحليل الواشنطن بوست أن 90٪ من ضحايا الحروب الأهلية هم من المسلمين. لم يكن هذا هو الحال على الإطلاق في القرن العشرين. لم يكن هناك الكثير من التوتر في العالم الإسلامي وخاصة بين السنة والشيعة ‏قبل هذا القرن. وراء هذه الفتنة الافتقار المذهل للقيادة. لا يكاد أي زعيم لدولة إسلامية ‏كبيرة يحظى بالدعم المشروع من شعبه في هذه الأوقات. أخيرًا ، الشعب الفلسطيني يتخلى عنه الجميع ولا سيما من يسمون بأصدقائه السابقين. نتيجة الحروب وسوء الحكم ، تسجل الحضارة العربية الإسلامية أدنى معدلات معرفة القراءة والكتابة ، وأسوأ الدرجات في حقوق الإنسان والمرأة ، وأدنى تقدم اقتصادي. لهذه الصعوبات ، التي لم يسبق لها مثيل منذ قرون ، تم ‏زيادة ‏مشكلة الأصولية الدينية ، وهو تعصب رجعي قاتل ومدمر للذات. إذا لم تكن أزمة ، فماذا ستكون؟ "بالطبع ، هذه المحنة لا تأتي من العقيدة الإسلامية نفسها ، لكن من الواضح أن دينكم قد تم استغلاله مرات عديدة في هذه الصعوبات. لقد قوض دكتاتور الديمقراطية التركية تحت ستار الدين ، ودمرت سوريا بسبب انقساماتها الدينية ،  ‏تطوّر التنافس القاتل بين شبه الجزيرة العربية وإيران على الخلاف الديني. الأمية لا ‏تتراجع لأن الدين يستخدم لمنع النساء من التعلم. نكافح من أجل تحديث اللغة العربية وتقريب شكلها المكتوب من الأشكال الشفوية بحجج الدين. لقد تم تشويه الإسلام ، واستخدامه دون تردد من قبل حكام مقمعين لاستعباد شعوبهم ، والاستيلاء على السلطة أو شن الحروب من أجل غايات الهيمنة. و انتهزت الحضارات الأخرى بطبيعة الحال الفرصة لتقدم بيادقها الجيوسياسية.

توضيح ثان: ليس إهانة لدين أن يعترف بأنه يمر بأزمة ، وبالتحديد فرنسا بلد عانى كثيرا من أزمات دينية مع محاكم روحية وحروب الدين. . إنها أرض  مجزرة القديس بارثولماوس حيث قُتل الآلاف من ‏الأبرياء ‏مفاجأةً بسبب إيمانهم البروتستانتي. كان الموت من أجل التجديف أمرًا شائعًا في فرنسا لعدة قرون ، كما كان ‏مجرد وجود ‏ ‏كتاب ديني ‏ ممنوع ‏في بيتك يأخذك إلى ‏

 المحك. ولهذه الأسباب بلا شك ، فإن الارتباط الفرنسي بهذا الفصل بين الدين والقانون هو علاقة فطرية ويوتوبية ومتطرفة بعض الشيء وأحيانًا تأتي بنتائج عكسية (كما هو الحال مع الرموز الدينية المحظورة في المدرسة). لكن لحظر الرسوم الكاريكاتورية ، ستكون هناك خطوة إلى الوراء  لا تطاق  بالنسبة لهذا البلد ، والتخلي عن حريته الدينية التي تحققت بنضال على مر القرون. أنا ، مثل العديد من الفرنسيين ، لم أحب أبدًا روح الدعابة الشريرة لـ Charlie Hebdo

 وأسمع أولئك الذين ينتقدون الإفراط ، كما أفهم الحزن الذي يمكن أن تسببه هذه الدعابة. ومع ذلك ، تُظهر هذه الأزمة أيضًا أن العالم الإسلامي بحاجة إلى تحرير نفسه من التلاعب والتأهيل وفرز الأشياء بدلاً من إعطائها الأهمية الأساسية التي لا يملكونها 

 ‏كان‏ ‏جريدة  شارلي هبدو ‏صغيرة ومتطرفة الى اليسار ، اكتسبت شعبية فقط  ‏عندما قُتل رسّاموها على أيدي  ‏الإرهابيين 

التوضيح الثالث: عندما يخشى السيد ماكرون أن الضواحي الفرنسية ‏ ‏مهددة بالانفصالية الإسلامية ، كيف يمكنكم أن تلوموه؟ عندما يتم صفير النساء غير المحجبات أو إهانتهن يوميًا في الضواحي ، وعندما يترك مئات الشباب ‏الفرنسيين ‏بيوتهم ليموتوا في سوريا ‏بلا أجل ، عندما يدعون ‏بعض رجال الدين الشباب إلى العصيان المدني أو الجهاد ، ما كنتم لتقولون نفس الشيء لو كنتم مكانه؟ مرة أخرى ، ليس دينكم موضع تساؤل ، بل إن استخدامه كأداة لغايات غامضة وعنيفة هو ‏المشكلة. لقد قتل بالفعل المئات من الضحايا ‏من الإرهاب ولا يجب أن تقبله أي روح مهما كانت معتقداتها.

توضيح نهائي: على عكس ما ‏يقولونه قادتك ، السيد ماكرون ليس عدوًا للمسلمين ، بل على العكس تمامًا. منذ انتخابه ، بذل جهودًا كبيرة لمكافحة الإسلاموفوبيا والتحيز ضد المجتمع المسلم. بينما دعا ‏أعداؤه إلى نقاشات حول الإسلام وأثاروا ‏الخوف من الإسلام والإرهاب لغايات انتخابية وسياسية ، فهو اختار دائمًا طريق المصالحة والحوار ، وهو الرئيس الفرنسي الوحيد الذي تحدث  عن الجرائم الاستعمارية التي ارتكبتها فرنسا في الجزائر على أمل إغلاق هذا الجرح.

إذن ما العمل ‏سوى دعوة الجميع إلى الحوار واحترام القانون؟ دعوة لقادة أفضل يبشرون بالسلام ولا يكذبون؟ هل  ‏تعتبر  ‏جريمة  ‏الملاحظة أن المجتمعات ‏بخير أكثرعندما يكون الدين منفصلاً عن الدولة؟ ‏يقول لي قلبي أن هناك شيئًا فاحشًا في ‏انتقاد فرنسا و علمانيتها في أيام الحداد ‏هذه . عندما ‏ ‏متطرفون يقتلون من أجل رسمٍ ، وتقطع رؤوس الأبرياء وتقطع حناجرهم ، يجب أن تبدأ ‏الانتقادات في مكان آخر ، وربما في ضمير الجميع.

18.10.20

Nos maisons symboles Our Symbolic houses

 


 Scroll down for French/Arabic 

Rebuilding a traditional Lebanese house is much more than saving our architectural or cultural heritage. It is a message.

These buildings, so beautiful and rare, are in reality symbols, real and unique mixtures of East and West. They were born when these two worlds still knew how to romance each other, coexist and mix smoothly. Their plans are oriental, their balconies are in Italian marble, their three arches are Venetian, their wood is Turkish, their red tiles come from Marseilles and their ceilings and moldings have a style from Baghdad. The inhabitants were similar to their homes, from diverse origins and speaking many languages. We had English lords and princes from the mountain, Christians, Muslims, Jews, Armenians and French, all born behind those sandstone walls. And these houses were surrounded by churches, mosques and even one of the most beautiful synagogues in the Middle East, forming together an orientalist fresco that celebrates the encounter of civilizations.

These houses, they are now in a very sorry state,  already battered by years of wars and negligence and then by this terrible explosion which was their coup de grace. They are there, before us, miserable  children abandoned by a West-East couple whose divorce has been consummated.  These fragile dwellings sadly remind us that we live in a world of separation and misunderstanding. And they die of it just like Lebanon, gravely sickened by its divisions.

If this heritage has the power to change the image of our Levant, we have no choice but to protect it.  When my children heard me talking on the phone about these so-called Baghdadi ceilings, they were at first surprised that it was the name of a horrible genocidal leader ... they now know that Baghdad and all of Mesopotamia were worth a lot more than the nickname of this invented caïd and that the Baghdadi ceilings are part of the soul of Beirut that we are trying to to save. And when, from New York, we see the start of rehabilitation work to which we have been able to modestly contribute, as this poster shows, our joy is immense. Thank you to all who support us on this journey of light and reconciliation.

https://www.gofundme.com/f/save-beirut-old-houses

Special thanks to all our donors and to our partners Mona Hallak, AUB Neighborhood Initiative, Nusaned and CTI Contractors.


Reconstruire une maison traditionnelle libanaise, c’est bien plus que sauver notre héritage architectural ou culturel. C’est un message pour l’humanité.

Ces bâtisses, si belles et rares, sont en réalité des symboles, des mélanges concrets et uniques d’Orient et d’Occident. Elles sont nées quand ces deux mondes savaient encore se parler, cohabiter et se mélanger en douceur. Leurs plans sont orientaux, leurs balcons sont en marbre italien, leurs trois arcades sont vénitiennes, leur bois est turc, leurs tuiles rouges viennent de Marseille et leurs plafonds et moulures ont un style de Bagdad. Leurs habitants étaient à leur image, d’origines variées et parlant de nombreuses langues. On avait des lords anglais et des princes de la montagne, des Chrétiens, des Musulmans, des Juifs, des Arméniens et des Français, tous nés derrière ces murs de grès. Et ces maisons étaient entourés d’églises, de mosquées et même d’une des plus belles synagogues du Moyen-Orient comme dans une fresque orientaliste qui célèbre les rencontres des civilisations. 

Ces maisons, les voilà désormais en bien piteux état,  déjà malmenées par des années de guerres et d’abandon puis par cette terrible explosion qui fut leur coup de grâce. Elles sont là, devant nous, malheureuses comme des enfants abandonnés par un couple Occident-Orient dont le divorce est consommé.  Ces fragiles demeures nous rappellent tristement que nous vivons dans un monde de séparation et d’incompréhensions. Et elles en meurent tout comme le Liban qui dépérit de ses divisions.

Si cet héritage a le pouvoir de changer l’image de notre Levant, nous n’avons d’autre choix que le protéger, Quand mes enfants m’entendirent parler au téléphone de ces plafonds dits Bagdadis, il s’étonnèrent d’abord que ce fût le nom d’un horrible leader génocidaire...  ils savent désormais que Bagdad et la Mésopotamie toute entière valaient bien plus que le sobriquet de ce caïd inventé et que les plafonds Bagdadis font partie de l’âme du Beyrouth que nous essayons de sauver. Et quand, de New York, on voit démarrer des travaux de réhabilitation auxquels nous avons pu contribuer même modestement, comme le témoigne cette affiche, notre joie est immense. Merci à tous ceux qui nous soutiennent dans ce voyage de lumière et de réconciliation. 

https://www.gofundme.com/f/save-beirut-old-houses

Un grand merci à nos donateurs et à nos partenaires Mona Hallak, AUB Neighborhood Initiative, Nusaned et CTI Contractors. 


بيوتنا الرمزية


إعادة بناء منزل لبناني تقليدي هو أكثر بكثير من مجرد إنقاذ تراثنا المعماري أو الثقافي. إنها رسالة للبشرية.


هذه المباني ، الجميلة والنادرة ، هي في الواقع رموز حقيقية ومزيج فريد من نوعه بين الشرق والغرب. لقد ولدوا عندما كان هذان العالمان لا يزالان يعرفان كيفية التحدث مع بعضهما البعض ، والتعايش والاختلاط بسلاسة. مخططاتها شرقية ، وشرفاتها من الرخام الإيطالي ، وأقواسها الثلاثة من البندقية ، وخشبها تركي ، قراميدها الحمراء من مرسيليا وسقوفها وقوالبها من بغداد. كان السكان يشبهون منازلهم ، من أصول متنوعة ويتحدثون العديد من اللغات. كان لدينا اريستوقراطيون إنجليز وأمراء من الجبل ، مسيحيون ، مسلمون ، يهود ، أرمن وفرنسيون ، جميعهم ولدوا خلف تلك الجدران المصنوعة من الحجر الرملي. وكانت هذه البيوت محاطة بالكنائس والمساجد وحتى بأحد أجمل المعابد اليهودية في الشرق الأوسط كما في لوحة جدارية للمستشرقين تحتفل بلقاء الحضارات.


هذه المنازل ، هي الآن في حالة يرثى لها للغاية ، وقد دمرتها بالفعل سنوات من الحروب والهجر و ثم هذا الانفجار  ‏ ‏الهائل. فها هي ، أمامنا ، بائسة مثل الأطفال الذين هجرهم والداهم من الغرب والشرق  متى تم طلاقهما. تذكرنا هذه المساكن الهشة للأسف أننا نعيش في عالم من الانفصال وسوء الفهم. ويموتون منها مثل لبنان ، الممزق بانقساماته.


إذا كان لهذا التراث القدرة على تغيير صورة بلادنا ، فلا خيار أمامنا سوى حمايته. عندما سمعني أطفالي أتحدث عبر الهاتف عن ما يسمى بالسقوف البغدادية ، فوجئوا في البداية لمّاسمعوا اسم زعيم مجرم و مخيف.

 ... إنهم يعرفون الآن أن بغداد وكل بلاد ما بين النهرين كانت تساوي أكثر بكثير من لقب هذا القائد المبتكر وأن السقوف البغدادية هي جزء من روح بيروت التي نحاول إنقاذها. وعندما نرى ، من نيويورك ، بداية أعمال إعادة التأهيل التي تمكنا من المساهمة فيها بشكل متواضع ، كما يوضح هذا الملصق ، فإن فرحتنا هائلة. شكراً لكل من يدعمنا في رحلة النور والمصالحة هذه.


https://www.gofundme.com/f/save-beirut-old-houses


شكر خاص لجميع المتبرعين وشركائنا منى حلاق ومبادرة الجوار في الجامعة الامريكية 

في بيروت و مجموعة نساند و CTI contractors 


Révolution Libanaise : An 2

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La révolution libanaise a un an. Elle est multi-communautaire, patriotique et érigée contre une classe politique corrompue qui a entraîné le pays dans le déclin et le chaos. Son défi aujourd’hui est de trouver une solution à l’impasse historique dans laquelle se trouve le Liban. 


Et là, force est de le constater, il n’y a point de miracle à l’horizon. La puissance militaire sur le terrain est toujours aux mains  du Hezbollah. Ce parti refuse pour l’instant de laisser tomber ses alliés parce qu’il lui servent de couverture dans son combat. C’est un parti dogmatique, fondé sur une conviction profonde que tous les maux du Liban viennent d’Israël et de l’Occident. Même la main tendue d’Emmanuel Macron n’a pas réussi à l’amadouer et ses ordres et son financement viennent en direct de Téhéran.


Une issue aurait théoriquement pu se profiler si ce parti avait changé de direction, lâché les partis traditionnels et véreux avec lesquels il était allié et tendu la main au nouveau Liban. Au lieu d’envoyer ses sbires tabasser les manifestants, il aurait pu dialoguer avec ce nouveau mouvement et avec la société civile.  Essayer de trouver un nouveau pacte national qui transcende les divisions communautaires et qui s’occupe du bien des Libanais d’abord, avant de celui des causes étrangères. Utopie sans doute. Mais qui sait? Un simple apaisement entre Iran et Etats-Unis aurait pu influencer les choses. Dommage qu’ il ne soit pas à l’ordre du jour...


L’autre voie, la seule restante, est une pression pour l’organisation d’élections législatives immédiatement et sous l’égide de l’ONU. Ces élections ne résoudraient pas tout mais elles pourraient éventuellement affaiblir voire évincer certains partis traditionnels arrimés au pouvoir et faire émerger au moins au niveau de la rue chrétienne et sunnite un mouvement nouveau et fort et un interlocuteur crédible devant le Hezbollah. Si les chrétiens et les sunnites lâchent leur vieux caïds qui les ont tous déçus et trahis, si les chiites lâchent au moins le parti Amal corrompu jusqu’à la moelle, il y a peut-être un petit espoir.


En conclusion, mes chers mouvements de la Thawra Libanaise, chers Bloc National, Beirut Madinati, Citizens in a State et tous les autres, nous vous en conjurons: nommez vite des leaders charismatiques, ambitieux et qui savent parler à ce peuple désabusé et revêche. Et faites-vite! Vous êtes déjà en campagne. 


Lebanese Revolution: Year 2


The Lebanese revolution is one year old. It is from all sects, patriotic and set up against a corrupt political class that has driven the country into decline and chaos. Its challenge today is to find a solution to the historic deadlock in which Lebanon finds itself.


And here, it is clear, there is no miracle in sight. Military power on the ground is still in the hands of Hizbullah. It refuses for the moment to let down its allies because they serve as a cover for its fight. It is a dogmatic party, founded on a deep conviction that all the evils in Lebanon come from Israel and the West. Even Emmanuel Macron's outstretched hand has failed to coax it, and its orders and funding come direct from Tehran.


Theoretically, an outcome could have been possible if this party had changed direction, let go of the traditional and shady parties with which it was allied and extended its hand to the new Lebanon. Instead of sending it’s goons to beat up the protesters, it could have engaged with this new movement and with the civil society. Trying to find a new national pact that transcends sectarian divisions and deals with the good of the Lebanese first, before that of foreign causes. Utopia, no doubt. But who knows? A simple appeasement between Iran and the United States could have influenced them. But it's not on the agenda right now ...


The other way, the only one left, is to push for the organization of legislative elections immediately and under the aegis of the UN. These elections would not solve everything, but they could possibly weaken or even oust certain traditional parties anchored in power and make emerge at least at the level of the Christian and Sunni street a new and strong movement and a credible interlocutor in front of Hezbollah. If Christians and Sunnis let go of their bosses who betrayed them all, if the Shia at least let go of the corrupt Amal party, there may be a small hope.


In conclusion, my dear movements of the Lebanese Thawra, Bloc National, Beirut Madinati, Citizens in a State and all the others, we beg you: quickly appoint charismatic, ambitious leaders who know how to speak to our disillusioned and stubborn people. And hurry! You are already in campaign


‎الثورة ‏اللبنانية: السنة الثانية


‎الثورة اللبنانية عمرها سنة. إنها متعددة الطوائف ، وطنية و رافضة للطبقة السياسية الفاسدة التي دفعت البلاد إلى ‏الانهيار والفوضى. التحدي الذي تواجهه اليوم هو إيجاد حل للمأزق التاريخي الذي يجد لبنان نفسه فيه.


‎وهنا ، من الواضح أنه لا توجد معجزة. ما زالت القوة العسكرية على الأرض بيد حزب الله. يرفض ‏هذا الحزب في الوقت الحالي أن يخذل حلفاءه لأنهم بمثابة غطاء له في معركته. إنه حزب ‏متشدد تأسس على قناعة عميقة بأن كل الشرور في لبنان تأتي من إسرائيل والغرب. حتى يد إيمانويل ماكرون الممدودة فشلت في إقناعه ، وتأتي أوامره وتمويله مباشرة من طهران.


‎من الناحية النظرية ، كان من الممكن أن ‏تتحسن الأوضاع لو غير هذا الحزب اتجاهه ، وتخلّى عن الأحزاب التقليدية ‏الفاسدة التي كان متحالفًا معها ومدّ يده إلى لبنان الجديد. بدلاً من إرسال أتباعه لضرب المتظاهرين ، كان بإمكانه الانخراط مع هذه الحركة الجديدة ومع المجتمع المدني. محاولة إيجاد ميثاق وطني جديد يتجاوز الانقسامات الطائفية ويتعامل مع مصلحة اللبنانيين أولاً قبل القضايا الخارجية . ربما  ‏كل هذا حلم و لكن من يعلم؟ مجرَد تهدئة بسيطة بين إيران والولايات المتحدة ‏تستطيع تغيير ‏اسلوب هذا الحزب. لكنها ‏بالاسف ليست ‏وارده في هذه الأيام ...


‎والطريقة الأخرى ، الوحيدة المتبقية ، هي الضغط من أجل تنظيم انتخابات تشريعية فوراً وتحت رعاية الأمم المتحدة. لن تحل هذه الانتخابات كل شيء ، لكنها قد تضعف أو حتى تطيح ببعض الأحزاب التقليدية الراسخة في السلطة وتجعل الظهور على مستوى الشارع المسيحي والسني على الأقل حركة جديدة وقوية ومحاورًا موثوقًا أمام حزب الله. إذا تخلى المسيحيون والسنة عن رؤسائهم الذين خانوهم جميعًا ، وإذا ترك الشيعة على الأقل حزب أمل الفاسد  ‏للغاية ، فقد يكون هناك بعض الأمل.


‎في الختام ، ‏إيها ‏التحركات من الثورة اللبنانية ، الكتلة الوطنية ، بيروت مدينتي ، مواطنون في دولة وكل الآخرين ، نناشدكم: ‏عينوا بسرعة ‏مسؤولين قويين وطموحين يعرفون كيف يتحدثون إلى هذا الشعب المحبط و ‏العنيد. و ‏ ‏اسرعوا! ‏الصراع الانتخابي ‏قد بدأ.


National Bloc - الكتلة الوطنيّة 

Beirut Madinati - بيروت مدينتي

26.9.20

Lettre à un Beyrouthin

 (scroll down for English)

Cher ami, 



Ce combat pour protéger ta vieille maison, c’est un message contre l’obscurantisme et la culture de la mort qui gangrènent cette région.


Contrairement à ce que certains te font croire, ce combat n’est pas celui d’une communauté contre l’autre. C’est plutôt le combat qui dresse les élites cultivées et les bonnes âmes qui tiennent à protéger notre héritage contre la lie de notre nation, cupide et pétrie de violence, de fanatisme et de populisme. C’est le combat de la civilisation contre l’arriération (ou « takhallof »), entre la culture de la vie et de l’amour et puis celle de la mort et de la violence si puissante dans notre région. J’ai remarqué avec plaisir que les architectes et les ONG les plus dynamiques pour restorer ces belles maisons  sont justement multi-communautaires. Les donateurs de notre petits fonds « Save Beirut Old Houses »  sont aussi de tous bords. C’est une des plus belles consolations que de voir des prénoms aussi divers, chrétiens, musulmans, juifs ou sans religion, tous ensemble au chevet de notre culture en péril. 


Tu envisages d’émigrer, pour assurer un avenir à tes enfants. Je ne peux pas te le reprocher ou t’en dissuader, je serais bien mal placé pour le faire étant moi même à l’étranger depuis l’âge de 14 ans. Mais étrangement, en ces trente ans d’exil, je ne me suis jamais senti aussi Libanais, je n’ai jamais été, avec mes enfants, autant à l’écoute et à la rescousse de ce pauvre Liban. Je m’étais un peu fâché avec lui pendant toutes ces années, je ne le visitais que rarement juste pour voir ma famille. Tout en lui m’exaspérait, sa faillite morale, ses infrastructures nulles, son environnement ravagé, son urbanisme sauvage, son manque de civisme érigé en système, tout comme sa corruption chronique et affligeante. Mais maintenant qu’il est presque mort, terrassé par tous ses maux, ma tristesse est immense, je lui pardonne tout ou presque, j’accours à son chevet de grand malade, je le cajole comme un vieux grand-père centenaire qui n’en peut plus, on l’embrasse et on ne ne veut pas voir partir.... 


Courage mon cher Beyrouthin, ne cède pas aux sirènes de la haine religieuse, ce serait rendre les armes à ceux-là même que tu vomis. Donner raison aux chantres du communautarisme et de l’intolérance ou “ta3assob”, ils sont toujours prêts à en découdre et tuer. Et restons fiers de notre petite culture levantine même quand elle est si mal au point. Comme l’a si bien dit ce président français qui s’est entiché de nous: le Liban est un trésor pour l’humanité toute entière.


Letter to a Beirutee


Dear friend,


This fight to protect your old home is a message against obscurantism and the culture of death that plagues this region.


Contrary to what some people have you believe, this fight is not that of one community against another. Rather, it is the struggle between the cultured elites and good souls who are keen to protect our heritage against the scum of our nation, greedy and steeped in violence, fanaticism and populism. It is the fight of civilization against backwardness (or "takhallof"), between the culture of life and love and then that of death and violence so powerful in our region. I noticed with pleasure that the architects and the most dynamic NGOs to restore these beautiful houses are indeed from all communities. The donors of our small fund "Save Beirut Old Houses" are also from all sides. It is one of my most beautiful consolations to see first names so diverse, Christians, Muslims, Jews or without religion, all together at the bedside of our culture in peril.


You plan to emigrate, to ensure a future for your children. I cannot blame you or talk you out of it, I would be in a bad position to do so, having lived abroad myself since I was 14. But strangely, in these thirty years of exile, I have never felt so Lebanese, I have never been, with my children, so attentive and to the rescue of poor old Lebanon. I had gotten a little over this country all these years, rarely visited it and only to see my family. Everything about it exasperated me, it’s moral failure, it’s lame infrastructure, its ravaged environment, its horrible constructions, its lack of civic-mindedness erected into a system, just like its chronic and pathetic corruption. But now that this good old Lebanon is almost dead, overwhelmed by all its ills, my sadness is immense, I forgive all but everything, I run to its bedside, I cajole it as if it was an exhausted hundred-year-old grandfather, I hug this guy  and I do not want to see him go.


Courage my dear Beirutee, do not give in to the sirens of religious hatred, that would be a surrender the very people you despise, the champions of communitarianism and intolerance or "ta3assob", they are always ready to do battle and kill. And let us remain proud of our little Levantine culture even when it is in dismay. As this French president infatuated with us said so well: Lebanon is a treasure for the entire humanity.

3.9.20

Tristesse et réconfort

 Le Liban moderne dans ses frontières actuelles a cent ans. Et c’est un bien triste anniversaire. Mais dans l’immense douleur des dernières semaines à la suite de la destruction d’une grande partie de Beyrouth, on peut quand même trouver des bourgeons de  consolation et d’espoir. 

En effet, l’explosion a tout soufflé emportant beaucoup de ce qu’on aimait dans cette ville. Jeunes ou moins jeunes, des Beyrouthins innocents, aimés de leurs communautés sont morts. Les maisons anciennes si belles et qui donnaient un peu de cachet à notre forêt de béton ont péri. Puis comme un symbole de toutes ces pertes réunies, une noble vieille dame, Lady Cochrane Sursock est partie, blessée par l’explosion et peut être éreintée d’avoir vu le patrimoine qu’elle avait défendu toute sa vie bec et ongle, jeté en pâture à l’obscurantisme et son palais si beau complètement ravagé.

Nous ressentons aussi l’humiliation et la nausée de voir l’incompétence de tous nos dirigeants, les uns arrogants essayant de se dédouaner maladroitement d’avoir transformé le Liban en bande de Gaza, l’autre en déni total, dépassé par l’ampleur du désastre, prostré sur son trône devenu strapontin et puis les partis d’opposition aussi peu convaincants, sans programme, sans idées, sans espoir. On a les dirigeants qu’on mérite, nous rappelle-t-on et ça fait mal d’être tombé si bas.


La consolation, elle, vient des gens, ceux qui se sont vite mobilisés dans les rues pour ramasser les débris et aider. Cette société civile qui a saisi l’occasion de se surpasser malgré sa douleur et sa rancoeur pour donner une leçon à tous. La ville a été nettoyée par leurs mains, ces jeunes ne veulent pas renoncer, ils ont encore le courage, ils sont beaux et positifs et ils sont de toutes les appartenances: Il y a des jeunes filles voilées qui ramassent le verre dans des rues de ces quartiers en majorité chrétiens. Il y a des Ali, des Hussein tout comme des Charbel ou des Elie qui s’affairent dans ces vieilles rues dévastées. Il y a ces architectes bénévoles qui aiment toujours cette ville si ingrate et qui sont à son chevet comme des médecins zélés. Il y’a ceux qui réparent de leurs propre mains en maçons improvisés. La consolation vient de tout cela, elle vient des amis personnels devenus amis du Liban et qui ont contribué financièrement à mon petit fonds improvisé pour envoyer de quoi réparer quelques vieilles maisons le plus vite possible. C’est le plus beau réconfort que de pouvoir dire non à la barbarie, non à la culture de la mort et de faire une vraie différence sur place. 


C’est un peu le pari de M. Macron quand il est venu voir Fairouz notre diva si célèbre et planter un petit cèdre dans notre montagne. Ces deux gestes symboliques disent non à la mort de cette idée folle qu’est le Liban, ce pays impossible mais qui concentre en lui toutes les contradictions et les  utopies de notre planète.

25.8.20

De New York à Beyrouth


En rentrant hier soir de nos quelques jours de vacances à Cape Cod, nous avons renversé et brisé un gros bocal de verre sur l’entrée le perron de notre maison à Manhattan.


C’est pourquoi je me retrouvai avec un balai à épousseter et enlever les éclats de verre clairsemés devant la maison, dans la chaleur étouffante des soirées d’été new-yorkaises, assailli par quelques moustiques voraces. Et dans cet épisode si futile, je ne pus m’empêcher de penser à ce qu’ont vécu mes compatriotes libanais en cet effroyable mois d’août, nettoyant le verre et les autres débris de leurs maisons soufflées par l’explosion du port, et cela pendant de longues heures et dans la chaleur humide de Beyrouth. Dix minutes à peine  désagréables pour moi contre des journées entières de nettoyage et de réparations pour eux. Un incident sans aucune gravité ici contre une apocalypse là-bas avec ses cortèges de morts, disparus et blessés. Ces Beyrouthins terrassés sont les victimes d’un État failli; leurs économies sont inaccessibles, leur devise n’achète plus rien et une simple vitre en ville ne peut plus être dénichée qu’en échange de billets verts.


Tout cela a de quoi me faire admirer leur courage de rester debout dans ce pays qui n’en finit pas de les maltraiter. De quoi m’encourager dans cette petite levée de fonds initiée avec mes enfants et dédiée à nos belles maisons traditionnelles, reliques si fragiles d’une civilisation perdue. Et de quoi m’émouvoir et me mettre en colère à la fois, surtout quand je fais la connaissance de ces familles au téléphone pour comprendre leur situation et que j’entends l’accent levantin si familier dans leurs voix brisées par ce désastre.


Ces bâtisses anciennes, nous ne savions pas vraiment les apprécier. Nous les maltraitions. Tout comme nos dirigeants ineptes et incompétents. Moi-même enfant  dans ce vieux Beyrouth, je les trouvais vieillottes et délabrées et leur préférais bêtement les immeubles modernes de verre et d’aluminium. Je ne savais pas encore que ce décor était le cœur-même de mon pays, fragile mais encore battant, l’âme piétinée, ottomane, italienne ou française, de cette ville. Ces vieilles maisons  sont désormais telles des victimes sur des brancards, défilant devant mes yeux par flopées, ravagées, déchiquetées, oblitérées par la stupidité meurtrière de cet incorrigible Orient. 


Alors de cette vieille brownstone new-yorkaise où j’habite, je rêve que nous puissions sauver les maisons de ces familles qui nous ont contactés. La tâche devant nous est noble et immense à la fois.

15.8.20

Architecture in peril / Architecture en péril

(scroll down for French)

Architecture in peril

They often have three arches, wooden shutters, red tiled roofs and stone walls. They also have balconies and verandas, iron balustrades. They are sometimes well over a hundred years old, remains of a civilization in peril, sacrificed by wars but above all by the greed and carelessness of the Lebanese authorities.

While they used to give Beirut a special architectural character, setting it apart from other capitals in the Middle East, our old houses and their little Italo-oriental feel were already rare. Many were swept away by the modernist rage and especially the lack of town planning and the endemic corruption of the regulator. After the end of the war, the Beirut town hall issued demolition permits carelessly, replacing our little gems, too small and too expensive to restore, by hideous residential skyscrapers. Take towers from Dubai and throw them in Neapolitan alleys, cement crowding out jasmine, aluminum and glass replacing stones and tile, you imagine the aesthetic disaster.

On each of my visits to Beirut, I used to mock what I called "architectural terrorism" disfiguring our old neighborhoods. At least a few good souls had managed to save some of the houses, often turning them into restaurants, sports clubs or bars. Not ideal but better than cement. Others have taken to building new floors above their old buildings turning them into hybrid creatures but keeping at least one or two facades with a semblance of charm. How to throw stones at these old Beirut landlords whose rents have never been regularized and who do not receive any assistance from their shady town hall?

After the explosion of August 4th precisely hit the few hundred old houses and old buildings still standing in the neighborhoods adjacent to the port. At a time when glass and window repairs cost thousands of dollars in a city stripped of its bank accounts, our architectural heritage is truly on the verge of extinction, a decisive disappearance this time. And don't let us hear about that damned phoenix rising from the ashes! In a century, Beirut will have grown from a small town of beautiful stones, gardens and red tiles to a forest of hideous concrete. Congratulations to our municipality for this achievement worthy of a book of records. How to make a city ugly as quickly as possible, well done ... Fortunately, civil society and UNESCO are mobilizing to try to protect our neighborhoods. Let us wish them success and let us be their ambassadors.

With the money raised by this initiative, we will help the occupants of these houses to bear the cost of the repairs in order to encourage them to stay there and thus preserve the architectural heritage of Beirut.
https://www.gofundme.com/f/save-beirut-old-houses

Elles ont souvent trois arcades, des persiennes en bois, des toits en tuile rouge et des murs de pierres. Elles ont aussi des balcons et des vérandas, des balustrades en fer forgé. Elles ont parfois bien plus que cent ans, vestiges beyrouthins d’une civilisation en péril, sacrifiée par les guerres mais surtout par l’appât du gain et l’incurie des responsables.

Alors qu’elles faisaient de Beyrouth une ville au patrimoine architectural intéressant et la distinguaient des autres capitales du moyen orient, nos vieilles maisons et leur petit air italo-oriental se faisaient déjà bien rares. Beaucoup furent emportées par la rage moderniste et surtout l’absence d’urbanisme et la corruption endémique du régulateur. Après la fin de la guerre, la mairie de Beyrouth a délivré des permis de démolir à tour de bras, laissant remplacer nos petits bijoux trop petits et trop chers à restorer en hideux gratte-ciel résidentiels. Prenez des tours de Dubai et faites les atterrir dans des ruelles napolitaines, le ciment évinçant le jasmin, l’aluminium et le verre remplaçant les pierres et la tuile, vous imaginez le désastre esthétique.

A chacune de mes visites à Beyrouth, j’ironisais tristement sur ce que j’appelais des « attentats architecturaux » défigurant nos vieux quartiers. Au moins quelques bonnes âmes avaient réussi à sauvegarder certains de ces vestiges en les transformant souvent en restaurants, clubs de sports ou bars innombrables. Pas idéal mais mieux que le béton. D’autres ont entrepris de construire des étages au dessus de leurs vieux immeubles tournés en créatures hybrides mais gardant au moins une ou deux façades avec un semblant de charme. Comment jeter la pierre à ces vieux propriétaires beyrouthins dont les loyers n’ont jamais été régularisés et qui ne reçoivent aucune assistance de leur mairie véreuse?

Après l’explosion du 4 août, ce sont justement ces quelques centaines de vieilles maisons et immeubles anciens encore debout dans les quartiers jouxtant le port qui ont le plus trinqué. A l’heure où les réparations des vitres et des fenêtres se négocient en milliers de dollars dans une ville dépossédée de ses comptes en banque, notre patrimoine architectural est vraiment en voie d’extinction, une disparition décisive cette fois. Et qu’on ne nous parle pas de ce satané phénix qui renaîtra de ses cendres! En un siècle, Beyrouth sera passée d’une petite ville de belles pierres, jardins et tuiles rouges à une forêt de béton hideux. Félicitations à notre municipalité pour cet exploit digne d’un livre des records. Comment enlaidir une ville le plus vite possible, bravo... Heureusement, la société civile et l’UNESCO se mobilisent pour tenter de protéger nos quartiers face à la pègre mafieuse et son avidité. Souhaitons leur de réussir et soyons leurs ambassadeurs.

NB:J'ai créé une initiative avec mes enfants Matthieu et Justine Choueiri ainsi que ma nièce Youmna Jalkh . Nous levons des fonds pour aider à couvrir les frais de réparation des maisons traditionnelles endommagées à Beyrouth afin de préserver son patrimoine architectural en danger. Merci de nous contacter si vous avez un projet de réparation d'une maison traditionnelle à Beyrouth endommagée par l'explosion du 4 août 2020. Nos contacts sur place à Gemmayze et Achrafieh vous visiteront  et financeront votre projet dans la mesure du possible. Nous mettrons a jour cette page avec des photos avant-apres.

https://www.gofundme.com/f/save-beirut-old-houses

Avec l'argent récolté par cette initiative, nous voulons aider les occupants de ces maisons à amortir le coup des réparations afin d'encourager de s'y réinstaller et préserver ainsi le patrimoine architectural de Beyrouth.

10.8.20

Tournons la page du général

J’ai un aveu à vous faire. J’y avais aussi cru en 1989. Le général, avec sa guerre de libération, voulait sortir les loups étrangers et réunifier le pays. il nous avait fait rêver. Bon, j’étais encore un enfant avant d’être précipité sur la route de l’exil. Puis de voir tous mes rêves se fracasser en guerres interchrétiennes et instauration d’un protectorat Syrien jusqu’en 2005.


Plus de trente ans après, il y a quelque chose de profondément pathétique dans l’image de ce même général, vieux, fatigué, arrimé à son siège pour lequel il a tant lutté et auquel il n’a accédé, à bout de souffle, que par l’équation du populisme et des armes iraniennes. Je pense qu’il y avait franchement cru, sa popularité 

 et son âme de frondeur avaient  fini par le persuader à tort qu’il pouvait être un sauveur. Au point qu’il en a oublié qu’il fallait un programme pour gouverner ce pays si difficile. Une nouvelle idée. Et à peine installé sur ce trône de pacotille, toute la nation  s’est effondrée autour de lui. Il est désormais là, prostré avec ses supporters agrippés à ce siège branlant, un radeau de la méduse libanais. 


C’est que son manque de flair politique a en réalité toujours été stupéfiant. Il s’est depuis des décennies  égaré en insultes contre ses ennemis, engueulades avec les ambassadeurs et contradictions en tout genre. Il s’est vautré dans des querelles sanglantes et divisé les chrétiens du Liban. Ses discours maladroits -comme celui il y a quelques mois où il invitait les Libanais mécontents à partir!-, la nomination arrogante d’un beau-fils sans charisme, son manque de discernement sur l’équipe dont il s’est entouré, autant d’erreurs funestes qui ont accéléré son naufrage et celui du pays. Il ne suffit pas d’être une grande gueule en treillis troqué pour un costume cravate pour devenir un homme d’Etat et certainement pas quand le pays qu’il faut gérer est un casse-tête historique 


Ses prédécesseurs n’étaient pas de meilleurs gestionnaires, loin de là, ils sont tous coupables de cette débâcle. Je ne m’étends pas sur celui qui a éventré la montagne pour construire une autoroute  à son nom menant à son village. Parler des incapables pantins choisis et installés pour leur insipidité serait une perte de temps. Mais ils avaient eu la lâcheté de s’effacer, laisser d’autres tenir les rênes du pouvoir et enraciner la corruption comme nouvau système. Aujourd’hui le peuple les vomit tous. 


D’aucuns ont vu dans l’alliance du général avec le Hezbollah (la seule entente durable qu’il ait jamais réussi à faire de toute sa carrière politique)  une occasion pour les chrétiens d’être protégés par le puissant mouvement chiite pro Iranien, voire de l’influencer positivement. Mais cet accord a vite montré ses limites. Il n’avait comme base commune que le populisme et le rejet des vieilles familles politiques. Le général n’a ni réussi à « libaniser » son allié, bien au contraire, ni persuadé ses chefs  de se préoccuper de  l’intérêt du Liban. Ou créer un projet commun avec eux. Ils avouent eux mêmes être plus intéressés par le port de Haïfa en Israël que celui de Beyrouth, une gifle à tous leurs concitoyens qui ont tant souffert ces derniers jours. Et même pour ce Hezbollah, cette alliance avec le général ne leur aura servi qu’à s’acheter quelques années de plus dans leur statut intenable de milice religieuse surarmée faisant un doigt d’honneur iranien aux grandes puissances, aux dépens du bien être et de l’avenir de tout un peuple. 


Aujourd’hui, que les intentions du général eussent été bonnes ou pas n’est plus vraiment la question. Le vrai sujet est la relève, tourner la page, trouver des hommes ou des femmes providentiels qui puissent apporter un vent nouveau. Oui, il aurait peut être pu au moins essayer de  dissoudre le parlement avec l’accord du premier ministre dans un coup d’éclat salutaire mais il n’y a peut être même pas pensé. Espérons juste que nos amis Aounistes acceptent d’avancer plutôt que rester braqués sur la défaite cuisante de leur général adoré. Il devait constitutionnellement plier bagage dans deux ans de toute façon. Alors que l’avenir  du pays, lui, reste inconnu.

9.8.20

Battons-nous

 Au lendemain des explosions meurtrières, quelles sont belles les images des ministères pris d’assaut par ces manifestants avec leurs drapeaux. Et comme ils me consolent les nombreux posts de cette génération en colère qui exige un nouveau Liban. Comme au 17 octobre, à chaque fois que ce peuple descend dans la rue, qu’il appelle à la fin du confessionnalisme et vomit tous ses caïds (tous!), mon cœur rebat au rythme de mon pays perdu.


Oui, moi, l’émigré de longue date, devenu français et citoyen du monde depuis plus de trente ans, je me surprends encore à espérer que mon petit pays du cèdre se ressaisisse enfin. Incorrigiblement nostalgique de ma ville natale, je n’ai jamais pu m’empêcher d’imaginer qu’elle puisse arrêter son inexorable  déclin amorcé en 1975. Mais à peine en légère rémission qu’elle replongeait encore plus bas dans sa faillite civique et morale, à mon plus grand désarroi et jusqu’à cette année apocalyptique. À l’image de ces porte-fenêtres de mon appartement d’Achrafieh, ma ville est désormais oblitérée mais toujours debout.


Alors, serait-ce différent cette fois? Ou le Liban s’assoupira-t-il à nouveau dans sa décadence ? Des élections anticipées semblent être à l’ordre du jour. Même du fond de mon exil j’ose vous le dire: Arrangeons nous tous pour voter. Ne cédons surtout pas au fatalisme, ce mal qui nous terrasse depuis des générations. Battons nous jusqu’au bout pour cette petite civilisation dont il ne reste vraiment plus que des lambeaux. Nous ne nous pardonnerons jamais  de ne pas avoir essayé. 

7.8.20

M. Macron, trop brillant pour être aimé


Étonnant Président M.Macron. Injustement mal-aimé dans son pays, il fait l’unanimité ailleurs.


Hier à Beyrouth, il était sur les lieux funestes de l’explosion, au chevet de la population meurtrie alors que les responsables Libanais trop conspués n’avaient même pas osé s’aventurer en ville.  Lui a même fait un bain de foule où il a tenté de consoler des Beyrouthins en colère lui attirant des “Vive la France” et une sympathie touchante. Même les dirigeants embarrassés par cette visite, les détracteurs de la France et les éternels ennemis de l’Occident n’ont pas osé dire un mot contre lui. 


Avant tout cela, sa gestion du Covid en France a été vertement critiquée depuis le premier jour par la presse française. Il aurait lui même apporté des pangolins contaminés à Paris qu’il n’aurait pas subi autant de remontrances. Et pourtant les chiffres ont montré que la France a mieux géré cette crise que la plupart de ses voisins et son économie est repartie bien plus vite que les autres pays d’Europe. Vus des États-Unis où l’épidémie s’est soldée par un soap opera grotesque et un deuxième rebond, M. Macron et son équipe  font franchement rêver.


Aucun président français depuis des décennies n’avait réussi à redresser l’économie et baisser la courbe du chômage. Aucun n’était parvenu à relancer l’investissement étranger à des niveaux aussi élevés. Aucun n’avait remis la France au devant de la scène internationale autant que lui sans parler de son courageux entêtement à relancer le mouvement Européen.


Alors pourquoi cet acharnement? Pourquoi cette négativité? Peut être est-ce cette coutume bien française où on ne pardonne rien aux gens brillants. Les premiers de classe comme M. Macron attirent tous les regards et se font sermonner sans repos, dans une recherche idéaliste de l’excellence. Les gens médiocres qui ne font rien, on s’en désintéresse, on leur pardonne et on les ignore. Mais pas M.Macron. Des gilets jaunes décérébrés voulaient même le décapiter moins d’un an après son élection! Ce n’est que quand il sera parti qu’on commencera  à lui tresser des lauriers. 

5.8.20

Les silos de mon port

Beyrouth a littéralement explosé en son cœur.


Ce grand bâtiment blanc devant le port, vu et revu dans les vidéos du tragique événement, il avait toujours intrigué l’enfant que j’étais, grandissant dans cette ville troublée. Mon père m’expliqua un jour que ce n’étaient que des silos à blés. Construits du temps béni où ce port était le plus important de la Méditerranée orientale et qu’il desservait tout le hinterland arabe, accueillant des navires du monde entier. Notre ville et sa rade bien abritée incarnaient alors l’image de ce Liban prospère, ouvert sur le monde. Pendant la guerre, la route pour sortir de Beyrouth-Est longeait ce port. La silhouette imposante de ses silos donnait à ma ville une allure de cité presque normale, me faisant oublier qu’elle était divisée en deux, constamment bombardée, plusieurs fois détruite et occupée. 


Le 4 août 2020, j’ai revu donc ce bâtiment et le port entier voler en éclat sur mon écran de téléphone. Une explosion dantesque qui emporta tout et détruisit ma ville natale en quelques secondes. Et de cette Amérique où je vis, j’ai versé une larme sur ces bons vieux silos qui avaient pourtant bien résisté aux guerres et au temps. Ils étaient comme un ultime rempart aujourd’hui effondré face à la barbarie, la négligence et la faillite d’un État. Tout comme les rares vieux immeubles et maisons du XIXème siècle qui survivaient encore dans nos quartiers surplombant le port. Ces reliques mal-aimées d’un passé plus glorieux, on les abattait déjà bêtement ou les encerclait de gratte-ciel immondes, cette explosion les a achevées. Nues, sans fenêtres ni leurs tuiles rouges, elles s’avouent vaincues, elles expirent. Je pense surtout à mes amis qui se battent encore courageusement là pour maintenir un semblant de civilisation dans cet Orient revêche, leurs bureaux ont été dévastés, leurs appartements aussi. Le souffle de l’explosion les a meurtris, il a blessé leurs parents qui connaissaient le Liban d’avant et que cette ville aurait dû choyer. 


En France, le 4 août 1789 était la date où les privilèges de la noblesse furent abolis. Espérons que pour le Liban, le 4 août 2020 sonne le glas de l’incompétence des responsables, de l’incurie des dirigeants et du laisser-aller meurtrier. Que l’hydre infâme qui nous dirige meure enfin de son propre poison.

27.7.20

Faillite morale

A l’heure où les ministres d’Occident viennent nous sermonner sur les réformes nécessaires au Liban et que des yeux incorrigibles cherchent encore la lumière d’outre-mer,  je m’évertue à répéter aux uns et aux autres que notre salut ne viendra que de nous-mêmes. Oui, la clef est bien là,  sous vos nez, cachée dans les 10452 km2 de cette petite terre. La maladie est interne et nous n’en guérirons qu’après un examen profond et un traitement ... de cheval, 

Au delà des divisions communautaires qui nous ont affaiblis depuis toujours, il y a un grand mal tout aussi grave qui s’est installé dans les craquelures du Liban. Il s’agit de la faillite morale de notre société qui a eu lieu bien avant celle de nos finances. Cette maladie était comme une drogue douce, entêtante et facile. Nous en étions presque fiers, dansant dans des soirées endiablées, servis comme des pachas par des employés de  maison, ou bien sûr au volant de voitures de luxe alors que notre pays ne produisait presque rien.

Je vous parle en effet de cette pseudo philosophie libanaise faussement sympathique du “vivre au jour le jour”, celle de croquer à pleines dents ce qu’il reste de notre pays béni des dieux par son climat, son histoire, sa cuisine et ses belles montagnes. Ce mythe galvaudé du phénix qui renaît de ses cendres nous a ainsi bercés si longtemps et autorisé tous les excès. Il 
nous a fait croire qu’on pouvait construire des hôtels de luxe sur d’anciennes décharges et bétonner tout notre littoral sans conséquence. Que notre manque de civisme était une marque de virilité ou d’ingéniosité et que les moralisateurs étaient juste des faibles. L’image des zaïms richissimes et celle des hommes d’affaires milliardaires sans raison nous ont fascinés et corrompus jusqu’à la moelle.

Mais elle était trompeuse l’ivresse de ceux qui ne construisaient aucun lendemain pour leurs enfants. La dure réalité a rattrapé ce Liban là. 
Les carrières sauvages ont rongé sa forêt. Les projets immobiliers rocambolesques ont détruit l’environnement et leurs appartements de luxe sont pourtant restés vides. Les touristes lassés de ce chaos ne sont presque plus venus. Les Libanais d’outre-mer ont recherché une mer plus propre ailleurs. La confiance dans un pays qui ne sait même plus ramasser ses ordures a naturellement chuté. Jusqu’à ce que le château de cartes s’effondre. 

Malgré la douleur de voir cette faillite morale devenue banqueroute nationale, on peut espérer qu’elle serve justement à redistribuer les cartes. Que le Libanais courageux, celui qui travaille vraiment, en triomphe.  Que celui qui cultive sa terre vende enfin ses belles récoltes. Que celles qui se battent sur place pour un pays moderne libre, laïc et civique soient enfin les héroïnes. Pas les hommes d’affaires véreux ou les chefs de guerre faillis et leurs épouses oisives. Qu’on revienne un peu sur terre et qu’on fasse le grand ménage dans cette petite maison libanaise. Ensemble.

21.7.20

Dernière saison ?

La courbe est bien plus grave que ce qu’on pouvait craindre, surtout les éternels optimistes comme moi. Aux Etats-Unis, le deuxième pic épidémique n’est pas juste un rebond, il est himalayen et terrifiant. Le décompte des contaminations quotidiennes a déjà largement dépassé le premier sommet et la courbe sinistre des décès monte implacable juste derrière, avec deux ou trois semaines de retard. 

L’ administration fédérale est passée de la guerre de l’intox et des contradictions au pur et simple déni: Après avoir lâchement délégué l’encombrante gestion de la crise aux États, on ne parle simplement plus du Covid, sauf pour critiquer la Chine et la peste qui en est venue. On se borne plutôt à faire campagne pour rester au pouvoir, contre vents et marées. On accuse les scientifiques de conspiration pour décrédibiliser leurs messages alarmants. 

Elle est là l’image lamentable de la plus puissante des démocraties travestie en mauvais show de télé réalité. Le candidat pour rester à la Maison Blanche est capable de tout, y compris sacrifier le pays sur l’autel de ses ambitions. Il est bien lointain le temps où cet homme faisait rire la galerie avec ses boutades. Il est soudain beaucoup plus tendu, la marée est bien basse et elle a dévoilé le varech nauséabond de son incompétence. Du coup, il passe à l’attaque, il tire à boulets rouges sur tous ses détracteurs, il les menace comme une hyène blessée. Il pousse même ses esbroufes jusqu’à attaquer la Chine sur ses atteintes aux droits de l’homme, lui, l’homme qui crache à longueur de journée sur les institutions et qui tourne en ridicule le droit international, il s’improvise en défenseur de contrées et de peuples lointains qu’il méprise et dont il ignore tout. 

Alors le show commence pour la première fois à battre de l’aile. Son audimat faiblit à mesure que les contaminations s’envolent. L’Amérique fière et patriotique s’inquiète, elle s’agace de sa débâcle sanitaire et économique, désormais internationalement reconnue. Alors, on ose un peu espérer que Novembre soit bien l’epilogue de cette pitoyable série. 

15.7.20

2020: Quelle année...

Quelle année !
Quelle année... à peine arrivés à sa moitié, nous avons déjà hâte qu’elle se termine ! Un virus nous a tous pris en otage, attrapés par la queue alors que rien ne semblait freiner nos courses respectives, plus folles les unes que les autres. Course au profit, course au succès, course à la croissance ou celle, plus obscure, à l’armement ou au pouvoir. 
À ce propos, heureusement que le virus ne semble pas avoir épargné le populisme. Donald Trump n’en finit plus de se ridiculiser, et avec lui l’Amérique, de cafouillage en calembour, sa démagogie de bas étage jadis dissimulée par la croissance économique est désormais dévoilée : elle est là, béante et obscène au grand jour. Bolsonaro est lui aussi malade du virus, aux sens propre et figuré alors qu’il niait presque son existence. Tout comme Boris Johnson avant lui, hospitalisé après avoir refusé fièrement de porter un masque ou de confiner l’Angleterre. Le virus nous a ironiquement rappelé le danger d’élire des bouffons par colère ou dépit. En cas de crise, on se rend compte qu’il vaut mieux un dirigeant compétent sans charisme qu’une grande gueule qui raconte n’importe quoi. 
Le virus a aussi réveillé des blessures. Je pense bien sûr à la plaie encore béante de l’esclavage ici en Amérique et la nécessité de continuer à lutter contre le racisme et les préjugés. Mais aussi à la blessure économique de cette révolution digitale où quelques brillants milliardaires pèsent insolemment plus que le PNB de certains pays, sans payer d’impôts ou presque, alors que la classe moyenne autour d’eux sombre dangereusement dans la pauvreté. La nécessité d’un retour au keynesianisme se profile. Espérons qu’il puisse sauver nos démocraties. 
Enfin, en Orient, les malheurs s’aggravent. Israël finit d’asservir les Palestiniens en leur volant le très peu de terres qui leur restent dans une impunité inégalée. La Turquie sombre dans l’obscurantisme. Puis mon pauvre Liban natal qui agonise : mal géré, endetté, corrompu et livré à ses démons, le virus est son coup de grâce. Je regardais hier cette vieille photo des années cinquante, montrant mon père trônant fièrement sur l’avant de sa première voiture dans cette montagne si belle. Emblématique d’un Levant disparu, ou d’un monde romantique dépecé par les loups. Cet Orient-là, désormais à genoux, saura-t-il un jour se ressaisir ?

12.7.20

Lettres ouvertes au Hezbollah- Lettre 3: Libérez-vous de vos démons.

Vous pourriez au contraire, avoir un sursaut patriotique. Une voix intérieure qui vous soufflerait: “On a remboursé nos dettes à l’Iran et à la Syrie, c’est le moment de nous occuper de nos propres problèmes, de notre terre et de nos enfants.”

Rêvons donc que vous puissiez renoncer au terrorisme et tourner le dos à votre passé violent de preneurs d’otage et d’assassins. Accepter que notre frontière sud ne soit plus le problème principal du Liban depuis 2006, et qu’elle ne nécessite vraiment pas des obus  iraniens pointés en permanence sur des villages israéliens. Essayer de tuer des civils innocents en Galilée ne vous avancera à rien, bien au contraire. Je ne vous demande pas de vous réconcilier avec Israël et accepter son régime d’apartheid. Je vous demande d’arrêter de servir l’Iran aveuglément. Vos enfants ont mieux à faire que jouer aux héros et mourir pour servir les ayatollahs. Même si le Liban restera solidaire avec les Palestiniens et ne signera la paix qu’en même temps qu’eux, il n’a vraiment aucun intérêt à harceler une frontière reconnue par quasiment tous les pays du monde depuis 1948 et y compris par les Palestiniens eux-mêmes. Remettez vos armes à l’armée libanaise et renforcez-la plutôt que lui faire de l’ombre.

Établissez une relation  apaisée mais distante avec la Syrie. Renouez avec les monarchies pétrolières. Émancipez vous de la tutelle de vos maîtres persans, arrêtez de gesticuler contre l’Occident. Négociez avec tous et faites-vous respecter par tous.  Le Liban est trop petit, trop fragile pour avoir plein d’ennemis. Être non-aligné dans cette région est une force, pas une défaite. 

En interne, lâchez vite vos sordides alliés. Arrêtez cette alliance avec un chef du parlement pourri et au pouvoir depuis trente ans. Faites-le arrêter et juger pour tout l’argent public qu’il a volé. Abandonnez ce président de la République sénile et son beau-fils détesté, la “couverture chrétienne” qu’ils prétendent vous donner n’est plus qu’un vulgaire épouvantail. Trouvez-vous de vrais partenaires compétents dans la société civile qui puissent gouverner un Liban neutre, ouvert et maître de lui même.


Puis enfin, et pardonnez mon insolence, renoncez à vos turbans! Ils sont pour beaucoup d’entre nous des symboles d’oppression et de théocratie. Taillez-moi un peu ces barbes-déguisement pour qu’on puisse vous montrer sans que vous fassiez peur à la planète. Ayez le courage de remettre les religions dans les temples. Comprenez enfin que le progrès et la civilisation ne sont pas une soumission à l’Occident mais juste une clé du bonheur.

Lettres ouvertes au Hezbollah - Lettre 2: Si vous ne changez rien

Vous êtes actuellement le seul parti qui ait du pouvoir dans ce pays. Et peu vous importent nos lamentations sur le Liban d’avant, désormais disparu. C’était un système qui, à tort ou à raison, paraissait injuste et défavorable à votre communauté chiite longtemps stigmatisée et démunie. Mais je veux vous rappeler que le Liban d’aujourd’hui est bien votre problème: sous votre coupe depuis des années, vous y faites la pluie et le beau temps, vous ne pouvez plus cracher dessus et vous en dédouaner. Vous ne pouvez plus être anti-système, vous êtes le système. 

Le vrai danger est que vous pourriez  continuer sur le mëme chemin  de destruction avec cette bande d’incapables à vos côtés. Finir de transformer  le beau Liban en décharge polluée et arriérée. Un pays isolé, en faillite, au ban des nations et embourbé dans ses contradictions. Vous réussiriez enfin à vous débarrasser des élites que vous méprisez. Exit le vieux Liban occidentalisé, votre Liban sera un  dominion des ayatollahs, pauvre, laid, malheureux et revendicatif. À la moindre révolte, vous lâcherez vos loups de leurs bidonvilles pour terroriser ceux qui osent encore protester. Un Liban voyou, toujours  prêt à en découdre, à s’autodétruire dans une guerre pour se reconstruire, vite et mal.

Mais sachez que vos enfants n’en seront pas plus riches ou heureux pour autant. Au contraire, les barrages hydrauliques mal construits auront pollué leur eau potable, leurs plages seront encore plus sales et bétonnées, l’air qu’ils respireront sera vicié et ils n’auront toujours pas d’infrastructures ou de transports dignes de ce nom. Ils seront encore plus  désavantagés (“mah7roumine”) que leurs aïeux avec la maigre et odieuse consolation que tous les autres se seront effondrés à leur niveau. Les belles pierres et les tuiles rouges auront définitivement fait long feu. Les autres villages seront désormais, eux aussi, construits avec des maisons en béton laides et  inachevées. Les communautés chrétiennes et les élites musulmanes se déliteront, perdant l’avantage que leurs écoles et universités occidentalisées leur conféraient. Ces établissements qui faisaient du Liban un bastion culturel dans une région obscurantiste seront morts par manque de fonds et d’élèves. Les banques que vous honnissiez car symboles de cette opulence injuste sont d’ores et déjà annihilées. Les citadins sunnites appauvris cesseront peut-être enfin de vous  prendre de haut mais l’hydre du fanatisme et de la misère se sera enracinée dans leurs quartiers. Et elle est souvent encore plus terrifiante et misérable que vos propres démons. 

Vous êtes actuellement le seul parti qui ait du pouvoir dans ce pays. Et peu vous importent nos lamentations sur le Liban d’avant, désormais disparu. C’était un système qui, à tort ou à raison, paraissait injuste et défavorable à votre communauté chiite longtemps stigmatisée et démunie. Mais je veux vous rappeler que le Liban d’aujourd’hui est bien votre problème: sous votre coupe depuis des années, vous y faites la pluie et le beau temps, vous ne pouvez plus cracher dessus et vous en dédouaner. Vous ne pouvez plus être anti-système, vous êtes le système. 

Le vrai danger est que vous pourriez  continuer sur le mëme chemin  de destruction avec cette bande d’incapables à vos côtés. Finir de transformer  le beau Liban en décharge polluée et arriérée. Un pays isolé, en faillite, au ban des nations et embourbé dans ses contradictions. Vous réussiriez enfin à vous débarrasser des élites que vous méprisez. Exit le vieux Liban occidentalisé, votre Liban sera un  dominion des ayatollahs, pauvre, laid, malheureux et revendicatif. À la moindre révolte, vous lâcherez vos loups de leurs bidonvilles pour terroriser ceux qui osent encore protester. Un Liban voyou, toujours  prêt à en découdre, à s’autodétruire dans une guerre pour se reconstruire, vite et mal.

Mais sachez que vos enfants n’en seront pas plus riches ou heureux pour autant. Au contraire, les barrages hydrauliques mal construits auront pollué leur eau potable, leurs plages seront encore plus sales et bétonnées, l’air qu’ils respireront sera vicié et ils n’auront toujours pas d’infrastructures ou de transports dignes de ce nom. Ils seront encore plus  désavantagés (“mah7roumine”) que leurs aïeux avec la maigre et odieuse consolation que tous les autres se seront effondrés à leur niveau. Les belles pierres et les tuiles rouges auront définitivement fait long feu. Les autres villages seront désormais, eux aussi, construits avec des maisons en béton laides et  inachevées. Les communautés chrétiennes et les élites musulmanes se déliteront, perdant l’avantage que leurs écoles et universités occidentalisées leur conféraient. Ces établissements qui faisaient du Liban un bastion culturel dans une région obscurantiste seront morts par manque de fonds et d’élèves. Les banques que vous honnissiez car symboles de cette opulence injuste sont d’ores et déjà annihilées. Les citadins sunnites appauvris cesseront peut-être enfin de vous  prendre de haut mais l’hydre du fanatisme et de la misère se sera enracinée dans leurs quartiers. Et elle est souvent encore plus terrifiante et misérable que vos propres démons.