31.3.20

La Terre en révision

Au beau milieu de cette épidémie, en lisant les lignes pessimistes si nombreuses dans la presse, on est en droit de s’interroger sur les solutions à apporter au monde après le coronavirus. « Mais le monde allait trop vite de toute façon», me disaient justement il y a quelques jours deux amis très chers touchés par le Covid 19. En scrutant notre Terre, ce bolide soudainement immobilisé, on y voit nettement deux failles creusées par ses décennies de course incontrôlée.

La première faille est le creusement des inégalités sociales, l’enrichissement exponentiel de certains et l’affaissement inexorable de nos  classes moyennes en voie de disparition. L’apparition d’un nouveau prolétariat “uberisé” né de la digitalisation a entraîné la montée des crispations, des populismes et du nationalisme et affaibli la démocratie. L’absence de coopération entre nations et les réactions insulaires se distinguent encore plus crûment à la lumière de cette épidémie.

La deuxième faille est bien sûr celle du marasme environnemental. A peine les mesures de confinement annoncées et les voitures raréfiées, on retrouve des horizons limpides qu’on ne voyait plus jamais dans les cieux de nos métropoles. La nature tente de reprendre ses droits dans une planète qui peine de plus en plus à absorber nos abus. Ces oiseaux se faisant plus bruyants à New York depuis le début du confinement, c’est comme s ils voulaient nous rappeler nos derniers hivers sans neige, nos océans pollués et nos animaux sauvages décimés devant nos yeux insensibles, jusque dans ce funeste marché où tout a commencé... Il est bien là ce sentiment désagréable que l’être humain est devenu comme une mouette nuisible qui mange les œufs des autres oiseaux autour d’elle pour se multiplier et les remplacer. Et ce virus l’a juste un peu ralenti.

Maintenant que la terre ne tourne plus rond, rendons-nous à l’évidence: Certains d’entre nous sommes bien des privilégiés retranchés dans nos maisons, nous faisant livrer nos bouteilles de vin par les autres, ceux qui n’ont pas le luxe d’arrêter leur travail et qui s’exposent à la pandémie. Nous percevons nos salaires en télétravail alors que les chauffeurs UBER ne peuvent même plus payer leur loyer et leurs factures. Nos commerçants peinent et nos restaurants ont licencié leurs employés mais Amazon et Zoom se délectent. Instagram me propose des livraisons de caviar à domicile alors que des infirmiers meurent à quelques rues d’ici. En applaudissant nos courageux personnels de santé tous les soirs à nos fenêtres, nous nous réjouissons parce que nous sommes trop longtemps ignorés les uns les autres et que cet horrible virus nous rassemble un peu, enfin.

Alors, on ne peut qu’espérer dans ce contexte que les plans de redressement pour l’après-coronavirus soient  justement des plans pour les solidarités, une nouvelle donne entre nous tous et un nouveau contrat avec la Terre. Que les milliards injectés pour relancer l’économie soient aiguillés pour requinquer cette classe moyenne en souffrance, renforcer les personnels d’hôpitaux, revaloriser les professeurs, les  chercheurs et oui, il faudra que les chanceux entre nous y contribuent davantage. Que les GAFA payent leurs impôts. Que l’argent ne finisse pas en dividendes cette fois ! Ou en abattements fiscaux pour milliardaires ou pire dans certains pays, annihilé par la corruption. Et que le long réveil écologiste balbutiant se matérialise enfin. Si la Terre s’est arrêtée, c’est bien le meilleur moment de la réparer.

18.3.20

Coronavirus en vers

Un bien étrange gus
Le coronavirus
Avec ruse et astuces
Met nos vies en hiatus

Ne prends ni trains ni bus
Dans une ville sous blocus
Églises sans angélus
Télétravail en sus

Que tu fusses Belge ou Russe
Et quoique tu en crusses
Sa forme de cactus
A changé tous nos us

14.3.20

Le temps du Coronavirus

Digne d’un scénario de science-fiction, la crise du Coronavirus s’est épanchée à travers le monde.

Et comme d’autres épidémies dans l’Histoire, ces phénomène de santé de par leur gravité et les peurs qu’ils engendrent, apportent inévitablement une lumière  douloureusement crue sur notre humanité. Au matin de la fermeture des frontières américaines aux pays européens on a mieux saisi à quel point les relations internationales sont devenues fragiles. On ne se concerte pas, on ne se coordonne plus entre anciens alliés, et pire encore, on s’en isole en critiquant leurs autorités, et sans même un mot de réconfort pour leurs populations. On ne dit pas qu’on se tient aux côtés de ses amis. On les rejette  soudainement comme des lépreux.

L’espèce humaine oscille entre son instinct de survie reptilien (celui qui pousse à prendre d’assaut les supermarchés) et le sens du devoir qu’on admire chez notre personnel de santé. Elle oscille entre ceux qui essayent de protéger leurs proches
 et les insouciants qui se trouvent « cool » de continuer à faire la bise sans se soucier des conséquences. Il y a les Italiens qui chantent sur leurs balcons malgré tout dans un superbe message d’espoir et les Espagnols qui applaudissent en chœur leurs personnels de santé sur les premières lignes du front. Ce terrible virus nous rappelle que nos querelles sont bien futiles, que les poumons des Iraniens sont aussi vulnérables que ceux des Américains, peut-être nous rassemble t’il un peu ainsi dans notre malheur.

Enfin, ces temps incertains, inquiétants ou excitants nous changent. Les admirateurs des dictatures disciplinées en applaudissent l’efficacité sans gêne, certains préfèreraient presque perdre leurs libertés dangereuses pour la santé publique. Et dans ma nouvelle réalité  de télétravail, isolé de longues heures derrière un écran, je m’interroge sur l’accélération du déclin des contacts humains, déjà mis en péril par la digitalisation. Et j’espère de tout cœur que le coronavirus ne nous laissera pas avec une démocratie encore plus affaiblie et une société où les écrans prennent davantage le pas sur nos vies.