8.11.22

Un homme de religion n’est pas au-dessus de la Loi

 Pardonnez-moi de poser cette question provocante : pourquoi un prélat se sent-il libre d’apporter 460 000 dollars d’aide humanitaire en provenance d’Israël alors qu’un citoyen libanais normal ne pourrait jamais le faire ? Que cet évêque doive passer cette frontière pourtant fermée, on peut essayer de le comprendre puisqu’il doit s’occuper de ses fidèles de l’autre côté et rentrer au pays. Mais qu’il utilise son statut d’homme de religion pour ramener de l’aide et des fonds me paraît pour le moins controversé. L’État a-t-il autorisé l’arrivée d’aide humanitaire en provenance d’Israël ou de Palestine ? Et si la réponse est non, pourquoi un homme de religion aurait donc le droit de le faire alors qu’un citoyen ordinaire serait sanctionné ? 

De manière générale, tous les défenseurs d’un État de droit devraient demander à tous les hommes de religion de respecter la loi du pays au lieu de s’octroyer des droits, puis d’attiser la haine confessionnelle et crier au loup à la moindre critique ou condamnation. Vous êtes contre les armes illégales ? Vous êtes contre l’interventionnisme iranien ? Soit vous devriez alors être également contre tout homme ou femme qui se sent au-dessus de la loi à cause de son statut religieux ou autre. 

Un évêque qui ramène des produits en provenance d’Israël pense peut-être aider sa communauté mais, ce faisant, il se compromet, il attise les dissensions sectaires qui séparent les Libanais et les empêchent de se gouverner. Il met de l’eau au moulin des conspirationnistes sectaires obsédés par la guerre et il aide ceux qui utilisent le sujet israélien pour manipuler et hypnotiser leurs suiveurs. 

Évidemment, personne n’est dupe de cette justice à deux vitesses qui laisse entrer des missiles balistiques ou du nitrate d’ammonium et ferme les yeux sur tous les contrebandiers du monde, pour s’acharner sur un évêque. En revanche, pour ceux qui veulent aider les Libanais exilés en Israël, le meilleur choix serait de demander une loi d’amnistie pour nos compatriotes accusés de collaboration avec Israël. On a bien une loi concernant les années 1975-1990, pourquoi exclure cette catégorie de personnes, vingt ans après la libération du Sud ? Elles aussi pour la plupart se sont retrouvées dans cet engrenage de violence malgré elles.

Mais ad nauseam j’aimerais le répéter : hommes religieux, de grâce, occupez-vous de spiritualité et de morale et laissez la politique aux politiciens. Muftis et évêques, vous n’êtes pas au-dessus de la loi. Au contraire, on attend de vous que vous soyez des citoyens exemplaires.

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