C’est le jour des élections à New York. À 6h30, je me présente avec mon certificat de délégué fait par Marc Daou, le candidat courageux de Aley qui, avec Najat Saliba dans le Chouf, ose défier l’ordre féodal de la Montagne avec un beau programme moderne, social et environnemental.
Ce matin, j’ai une certaine fierté à représenter ce que j’estime être le nouveau Liban, encerclé par une horde de délégués des partis confessionnels bruyants, forts de leur nombre et habillés en orange ou en rouge. Je suis l’intrus qui arbore la photo de Marc Daou sur mon téléphone en guise d’uniforme. Je ne suis pourtant ni druze ni de Aley, mais justement, c’est ça qui est d’autant plus motivant dans les nouveaux mouvements indépendants et issus de la révolution d’octobre. On est ensemble dans ce même bateau, celui d’un Liban qui essaye de se ressaisir, un Liban uni. Notre confession n’est plus qu’un code obsolète pour nous identifier dans des registres. Elle ne nous régit plus. Autre petit signe de notre modernité, notre application mobile qui permet de trouver les électeurs et décompter les voix est bien supérieure aux archaïques listes d’émargement des autres délégués.
J’entends déjà certains maugréer et critiquer les listes du changement : certes, les nouveaux candidats ne sont pas parfaits ! Certains nous surprendront peut-être et d’autres nous décevront, mais ne valent-ils pas la peine qu’on leur donne une chance contre ceux qui ont détruit le pays à coups de guerres et d’incurie ? Est-il possible d’aimer le Liban et le livrer quand même à ses mêmes éternels bourreaux après tout ce qu’ils lui ont fait subir ? Les jeunes qui viennent voter nombreux à New York semblent être de mon avis. Des tapes sur mon épaule, des clins d’œil et des sourires à la vue de mon fond d’écran « thaouresque » m’encouragent.
Je profite d’une accalmie pour aller voter pour le changement dans le bureau voisin de Beyrouth I. Ici aussi, le fonctionnaire fait un travail remarquable pour empêcher toute interférence des partis traditionnels. Je plonge mon pouce dans cette encre violette et me réjouis. Rien ne changera du jour au lendemain, mais un nouveau Liban est vraiment en marche. Espérons que la population entière lui donne une chance dimanche prochain.
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