C’était
l’été 1982, celui de l’invasion israélienne du Liban, où parmi plusieurs
familles beyroutines, nous avions déménagé dans une petite station balnéaire à
une quarantaine de kilomètres, loin de la ville assiégée et des raids aériens.
Le
petit appartement face à la mer censé nous accueillir en week-end devint un
camp retranché pour ma famille où je passai,en enfant de 7 ans, un été
remarquablement normal dans
des circonstances hors du commun, en compagnie de ma soeur et mes
cousins inséparables. Une autre famille d'amis habitait dans le même complexe, celle
d’Alain. Même si mes souvenirs sont lointains et vagues je me rappelle soudain
aujourd’hui cette compétition de natation organisée dans la grande piscine de
l’établissement. Alain, plus âgé que moi nageait très bien et gagna la médaille
d’argent de sa catégorie suscitant notre admiration. Sa petite sœur participa aussi,
ne gagna pas mais termina sa traversée courageusement malgré sa fatigue. Et le
lendemain matin, ce fut elle qui portait la médaille d’Alain. Son grand frère la lui avait donnée par pure gentillesse et générosité.
Ce
matin à New York, j’ai appris avec tristesse la terrible nouvelle du tragique
décès d’Alain. Et sur mon chemin du bureau en cette journée grise, ce lumineux souvenir vieux de plus de trente ans a resurgi dans ma
mémoire, comme un clin d’œil, une petite consolation et un témoignage émouvant.
Cet adolescent sportif et sympathique nous avait montré un exemple et des valeurs importantes cet été là: le don de soi, l’altruisme et l’importance de la
famille. Même si je ne l’ai plus revu depuis des décennies, j’ai voulu lui
rendre ce dernier hommage.